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Les pertes post-récolte de teff éthiopien

Il est communément admis que les pertes post-récolte tout au long des chaînes de valeur des produits de base sont généralement élevées. Cependant, une nouvelle note de recherche du Programme d’Appui Stratégique de l’Ethiopie (ESSP) suggère que dans le cas du teff éthiopien, cette règle pourrait ne pas s’appliquer.

La note commence avec certaines critiques concernant la manière dont les pertes post-récolte ont été mesurées et estimées. Ces critiques incluent un manque d’utilisation des estimations détaillées des enquêtes sur le terrain, un préjugé à l’égard des produits alimentaires périssables (ce qui mène à une surestimation de la quantité réellement perdue), et l’exclusion d’aliments comme les céréales, les tubercules et les légumineuses, qui constituent la majeure partie de la consommation calorique dans les pays en développement.

Les auteurs tentent de surmonter ces pièges en utilisant des enquêtes de terrain à grande échelle réalisées en 2012 au sein d’une large série d’intervenants du teff, des agriculteurs aux détaillants urbains, dans la plupart des régions productrices de teff et dans la capitale Addis Ababa. Ce large objectif – englobant 1200 agriculteurs producteurs de teff, 205 grossistes et camionneurs ruraux et 75 urbains, et 282 points de vente – a donné un résultat surprenant. De tout le teff produit, seul 2,2 et 3,3 pour cent ont été perdus.

Pour atteindre cette estimation de la perte réelle après la récolte de teff, l’étude a examiné la structure de chaîne de valeur la plus répandue à travers laquelle voyage le teff en Ethiopie – de l’agriculteur au grossiste rural, puis du grossiste urbain et au détaillant urbain. A chaque niveau de la chaîne, les auteurs ont demandé quelle quantité de teff a été perdue à la récolte, au stockage et pendant le transport ; une somme de ces chiffres a ensuite été utilisée pour estimer les pertes totales post-récolte tout au long de la chaîne de valeur.

La gamme des niveaux de perte – de 2,2 pour cent à 3,3 pour cent – dépend des installations de stockage utilisées et des pertes supposées pendant le transport vers la ferme. La plupart des agriculteurs dépendent des structures traditionnelles de stockage, soit des bocaux en terre ou les greniers traditionnels des ménages. Quelques agriculteurs ont signalé des pertes pendant le stockage à la ferme, et les auteurs ont estimé que seuls 0,2 pour cent du teff récolté est perdu pendant le stockage au niveau de la ferme. Au niveau de la vente en gros, 0,3 pour cent de perte ; et 0,2 pour cent de perte au niveau de la vente au détail.

En termes de transport, l’analyse a montré que la plus grande partie du teff n’est pas transportée par les agriculteurs sur de grandes distances ; ainsi, les pertes subies par les agriculteurs pendant le transport ne sont pas significatives. Du transport aux grossistes puis aux détaillants, les pertes agrégées sont estimées à 0,1 pour cent par les grossistes et les détaillants.

Quelles sont les implications de ces pertes étonnamment faibles ? En termes de recherche, les auteurs soulignent l’importance d’utiliser des données d’enquête primaire pour mesurer et estimer les pertes. Ils soulignent également que leurs conclusions sur les pertes plus faibles que prévues pourraient être dues soit à des estimations antérieures trop élevées et donc inexactes, soit à des améliorations des conditions des routes qui ont permis de réduire les pertes enregistrées dans cette dernière étude. Déterminer dans quelle mesure chaque facteur – mauvaises mesures antérieures ou amélioration des infrastructures – a joué un rôle dans les pertes post-récolte réelle de teff en Ethiopie sera important pour les travaux futurs. Plus spécifiquement, les auteurs soulignent la nécessité de réaliser des enquêtes au niveau du consommateur et au niveau des producteurs concernant les pertes de teff dans les zones éloignées.

En termes d’implications politiques, les chercheurs et les gouvernements doivent consulter le taux de rendement des différents types d’investissements pour réduire les pertes post-récoltes. Ceci permettra de mieux comprendre les coûts des pertes post-récoltes et de réduire ces pertes sur les plans économique et politique pour les pays pauvres.