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Transmission des prix dans les marchés de culture pour la sécurité alimentaire

Depuis la crise de 2007-2009, une attention très particulière a été accordée à la question de la transmission des prix du marché mondial vers les marchés nationaux, en particulier dans les régions en développement telles que l’Afrique sub-saharienne. Un nouveau document publié dans le Journal of Agricultural Economics se penche sur sept cultures de sécurité alimentaire au Nigéria – maïs, mil, sorgho, riz, manioc, igname et niébé – pour évaluer la transmission des prix aux niveaux local (urbain et rural), régional et international. L’étude examine comment et pourquoi les prix fluctuent dans diverses conditions et examine les relations entre les prix nigérians aux niveaux mondial, régional et interne, pour ces cultures de base.

Le Nigéria est un cas d’étude intéressant pour la transmission des prix en raison de la grande superficie de son territoire et en raison de son marché de produits alimentaires influent dans l’Afrique dans son ensemble. Comprendre comment les marchés de produits alimentaires de base dans le pays et dans la région sont interconnectés permettra une meilleure conception et mise en œuvre des interventions de marché et des politiques alimentaires.

Les prix mondiaux ont été obtenus à partir de la Banque Mondiale (BM), du Fonds Monétaire International (FMI), du Système Mondial d’Information et d’Alerte Précoce (GIEWS), et de la Southern African Exchange (SAFEX). Les données mondiales sur le maïs et le riz proviennent également de UNComtrade qui détient les registres des importations du Nigéria depuis 1995. Les prix dans les pays voisins (Bénin, Togo, Ghana, Burkina Faso, Niger, Tchad et Cameroun) ont également été obtenus à partir de GIEWS et de l’outil d’analyse des données sur les prix du PAM.

Deux villes dans chaque pays ont été évaluées pour ajouter une variation régionale aux conclusions ; une ville intérieure reliée par la route au Nigéria et une ville portuaire, plus connectée aux marchés en dehors de l’Afrique de l’Ouest. A l’intérieur du Nigéria, les prix ont été obtenus à partir du Bureau National Nigérian de la Statistique. Les prix urbains sont disponibles pour la période de 2001-2010, alors que les prix ruraux n’étaient disponibles que pour la période 2007-2010. Le taux de change utilisé était le Naira nigérian par dollar US tiré de la base de données statistiques financières internationales du FMI.

Les résultats montrent que les conditions locales (conditions climatiques, bilans approvisionnement/utilisation, etc.) et la négociabilité sont des facteurs importants dans la transmission de prix pour toutes les cultures étudiées. Ces facteurs semblent être plus importants que les pics des prix internationaux dans la détermination des prix dans tous les marchés nationaux, particulièrement dans les zones rurales. De plus, les pics de prix semblent provenir des pays voisins plus que des marchés mondiaux.

Alors que ces conclusions générales sont vraies à tous les niveaux pour toutes les cultures étudiées, l’étude a également identifié des différences importantes entre les cultures.

Pour le maïs, les résultats montrent que les prix dans la majorité des marchés analysés évoluent ensemble, dans une certaine mesure. Les prix du maïs au Nigéria s’ajustent aux prix mondiaux, mais avec un long temps de latence. Le commerce de céréales secondaires est essentiellement régional. En fait, pour certains marchés de maïs, les liens entre les prix des pays voisins et les marchés nigérians sont plus étroits que les liens entre les marchés à l’intérieur du Nigéria. Les marchés nationaux ruraux et urbains ne semblent pas être bien intégrés, étant donné que les prix ruraux n’évoluent pas avec ceux des zones urbaines. Les auteurs indiquent que ces résultats sont généralement similaires pour le mil et le sorgho.

Les résultats pour le riz importé montrent que les liens avec les prix mondiaux semblent plus solides que ceux constatés pour les céréales secondaires, en particulier dans les zones urbaines. L’étude a montré que les prix pour le riz importé sont plus étroitement liés parmi les zones urbaines nationales que parmi les zones urbaines et rurales nationales. Les conclusions pour les prix du riz local étaient similaires à celles pour le riz importé, avec des liens solides constatés entre les marchés nationaux et internationaux. Les liens urbains-ruraux semblent généralement plus solides pour le riz local que pour le riz importé pour tous les Etats à l’exception de Lagos et Rivers (où sont situés les ports les plus importants). Globalement, la correspondance entre les prix mondiaux du riz et les prix urbains nationaux du riz (importé et local) est solide pour toutes les régions.

Pour le manioc, les résultats étaient plus variés au niveau régional. Par exemple, à Lagos, le lien entre les marchés mondiaux et locaux est plus solide que le lien entre les marchés régionaux et locaux ; cependant, l’inverse est vrai pour les prix du manioc dans l’Etat de Kano, où les liens avec les marchés régionaux semblent plus solides que les liens avec les marchés mondiaux. De même, la transmission des prix du manioc semble se produire rapidement parmi les marchés du nord du Nigéria.

L’étude a montré que les prix de l’igname au Nigéria sont relativement plus indépendants des mouvements des prix mondiaux que pour les autres cultures étudiées. Au niveau national, les prix de l’igname semblent évoluer rapidement entre les marchés urbains et ruraux et des pôles commerciaux aux marchés urbains.

Les prix des niébés semblent être plus étroitement liés à l’intérieur des marchés au Nigéria qu’entre les marchés nigérians et les marchés internationaux. Au sein de ces marchés nationaux, les prix évoluent plus étroitement entre les marchés urbains et les marchés ruraux qu’entre les pôles commerciaux et les marchés urbains.

La conclusion finale majeure de l’étude est que, particulièrement pour les prix du riz importé et des céréales secondaires, il existe soit des coûts de transaction considérables soit des différences de qualité qui aboutissent à des primes pour aliments importés et/ou des augmentations de prix capturées par des commerçants ayant plus de pouvoir de marché. Les auteurs concluent qu’une étude plus approfondie de la structure des marchés est importante pour établir le rôle du pouvoir de marché sur les marchés nationaux du maïs et du riz.