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Petits producteurs et avocats au Kenya

 

Cet article a été écrit par Mulubrhan Amare et Julia Wilson.

Le Kenya est le troisième plus grand producteur d’avocats au monde. L’avocat est le fruit le plus exporté par le Kenya, représentant pratiquement un cinquième de ses exportations horticoles.

Mais le Kenya n’exporte que 10% de sa production totale d’avocats. En comparaison, le Chili exporte 55% de sa production et l’Afrique du Sud 60%.

L’avocat est produit dans différentes régions du Kenya et environ 70% de sa production est réalisée par de petits producteurs. Ces derniers en produisent à des fins de consommation, de vente sur les marchés locaux et d’exportation.

Le marché des exportations d’avocats au Kenya est dominé par cinq exportateurs majeurs : Kakuzi, Vegpro, Sunripe, Exportateurs Horticoles du Kenya, et les Producteurs de l’Afrique de l’Est. Ces entreprises achètent principalement leurs avocats aux petits producteurs, bien que certaines d’entre elles en achètent à de gros exploitants ou possèdent leurs propres plantations.

Dans une nouvelle étude , nous faisons une enquête auprès de 790 producteurs d’avocats au Kenya et analysons les contraintes auxquelles ces petits exploitants font face sur le marché des exportations. Nous étudions ensuite les conséquences que cela a sur leur activité, et notamment sur les travailleurs – de la famille et embauchés – sur le rendement des exploitations agricoles, sur les prix de vente, et enfin sur les revenus.

Nous trouvons qu’une augmentation des exportations d’avocats du Kenya pourrait augmenter les revenus des petits exploitants. Mais pour cela, les décideurs politiques doivent réduire les barrières auxquelles les petits exploitants font face pour exporter leur production. Celles-ci incluent les coûts de récolte et de transport, ainsi que le besoin en liquidités, mais également des coûts de transactions auprès des associations de producteurs, tels que des frais d’adhésion et le coût d’opportunité associé au temps passé dans les réunions.

Barrières à l’entrée

Les petits producteurs d’avocats au Kenya font face à d’importantes barrières à l’entrée sur le marché des exportations.

  • Contrainte de capital et de liquidité . Ils n’ont souvent pas assez de capital pour faire face aux coûts élevés de participation sur le marché des exportations. Par exemple, ils ne sont pas souvent en mesure d’acheter ou de produire des avocats de meilleure qualité. Dans la plupart des cas, les producteurs doivent récolter et transporter leurs produits eux-mêmes jusqu’aux remises ou aux bâtiments des entreprises. Ils sont ensuite payés dans un délai de une à deux semaines.
  • Accès limité au support institutionnel et aux technologies de production . Par exemple, les prêts et les formations. Ceci signifie que les petits exploitants d’avocats sont en dehors de la chaîne de valeur.
  • Mauvaise infrastructure . Dans les zones rurales, le manque d’un bon réseau routier rend le transport de produits vers des marchés plus éloignés difficile et cher.

Les bénéfices des exportations

Nous avons trouvé que la participation sur le marché des exportations augmentait les revenus des petits exploitants d’environ 39%. Ce résultat s’explique principalement par les prix élevés pratiqués sur les marchés internationaux. Par exemple, une douzaine d’avocats Hass, que l’on reconnaît à leur peau vert foncé et marron et à leur noyau plus petit que la moyenne, est vendue 3,5 shillings kényans (0,03 $) sur le marché domestique contre 6 shillings kényans (0,06 $) sur le marché global.

La participation des petits exploitants sur le marché des exportations augmente également les opportunités d’emploi au sein de la communauté. Les avocats vendus sur les marchés internationaux sont de meilleure qualité et leur production demande un nombre plus élevé de travailleurs.

Notre étude montre que le coût des travailleurs embauchés augmente d’environ 1,300 schillings kényans (13 $) et que les employés des familles des petits exploitants travaillent environ 15 jours de plus, si ces derniers exportent leurs produits.

Nous montrons également que les petits exploitants actifs sur le marché des exportations sont plus âgés et ont reçu plus de formations que ceux qui sont actifs uniquement sur les marchés locaux.

De plus, les exploitations agricoles des exportateurs sont en moyenne 0.11 hectare plus larges et possèdent plus d’avocatiers de type Hass, la variété privilégiée sur les marchés internationaux.

Les petits exploitants participants sur le marché des exportations vivent également plus près d’une association d’agriculteurs organisée et bien établie. Ces associations permettent aux producteurs de partager leurs techniques agricoles afin d’améliorer la qualité de leurs produits et d’augmenter leurs rendements.

Les associations sont plus à même de négocier des contrats agricoles qui accordent aux producteurs des prix plus élevés tout en réduisant leurs coûts ainsi que les barrières de communication entre les entreprises contractuelles et les exploitants.

Cependant, nous trouvons que seul un petit groupe d’exploitants exporte à travers un contrat agricole.

Communiquer avec les exportateurs

Le gouvernement kényan, reconnaissant le potentiel d’augmentation des exportations et du bien-être des petits exploitants, a récemment incité les petits exploitants à se mettre en relation avec des exportateurs. Mais l’intégration aux marchés des exportations demeure une barrière difficile à surmonter pour les petits exploitants.

Afin de rendre les marchés des exportations plus accessibles aux petits exploitants, le gouvernement kényan devrait augmenter l’approvisionnement en jeunes plants et faciliter l’accès aux programmes de formation à la culture de l’avocat. Des mesures destinées à promouvoir les exportations et à inciter la conception de contrats innovants devraient augmenter le rendement des petits exploitants et améliorer la qualité de leur production. Ceci permettrait aux petits exploitants d’être actifs sur le marché des exportations.
Enfin, les programmes centrés sur l’amélioration de la qualité des associations de producteurs, en les rendant plus organisées et mieux connectées aux ressources et aux entreprises contractuelles, permettraient d’augmenter la participation des petits exploitants sur les marchés des exportations à long terme.

 

Mulubrhan Amare est Chercheur Associé à la Division de la Stratégie de Développement et de la Gouvernance de l’IFPRI ; Julia Wilson est Interne en Communication à l’IFPRI. Cet article a été publié pour la première fois sur The Conversation .

Cette étude a été financée par le Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas à travers l’offre sur l’Emploi Productif de la Recherche pour le Développement Inclusif en Afrique Subsaharienne du NWO-WOTRO.