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Politique macroéconomique et agriculture

Les politiques macroéconomiques (politiques monétaires et fiscales, politiques de taux de change et politiques commerciales) peuvent avoir un impact significatif sur le développement agricole et la sécurité alimentaire, et vice versa. Cette relation complexe est le sujet d'un nouveau livre, Macroéconomie, agriculture et sécurité alimentaire : Guide pour l'analyse des politiques dans les pays en développement, écrit par Eugenio Diaz-Bonilla, chercheur principal invité de l'IFPRI.

Selon l'auteur, les politiques agricoles macroéconomiques sont essentielles tant pour les économies des pays en développement que pour l'économie mondiale, et ce pour plusieurs raisons : (1) l'agriculture représente une part importante de la production intérieure globale, des exportations et de l'emploi des pays en développement ; (2) la croissance agricole réduit davantage la pauvreté que la croissance dans d'autres secteurs ; et (3) les pays en développement jouent un rôle important dans la production agricole mondiale et le commerce agricole international. Par conséquent, toute politique qui encourage ou entrave la croissance et le développement de l'agriculture peut avoir de graves répercussions - tant positives que négatives - sur la croissance économique et la réduction de la pauvreté dans le monde entier.

L'ouvrage commence par une introduction à l'analyse des politiques macroéconomiques à l'aide d'un cadre simplifié de cohérence macroéconomique ; il présente ensuite plusieurs théories liées aux divers aspects de l'élaboration des politiques macroéconomiques dans les pays en développement. Selon l'auteur, les responsables politiques doivent garder à l'esprit deux principes essentiels lors de la conception des politiques publiques : la règle de Tinbergen, qui stipule que le nombre d'instruments politiques utilisés doit être égal au nombre d'objectifs politiques ciblés ; et le principe de Bhagwati, qui stipule que les politiques doivent être adaptées aussi étroitement que possible à l'objectif visé.

En outre, l'ouvrage souligne que si les politiques macroéconomiques jouent un rôle essentiel dans le développement économique et la réduction de la pauvreté, elles ne sont pas suffisantes à elles seules. Les décideurs politiques devraient plutôt adopter une approche plus large qui, outre la macroéconomie, prend en compte les investissements dans le capital humain, les filets de sécurité sociale, le fonctionnement du marché et les infrastructures. L'impact de ces politiques sur les populations rurales devrait être particulièrement souligné dans les régions en développement comme l'Afrique au Sud du Sahara.

Les structures économiques peuvent varier considérablement d'un pays à l'autre ; les décideurs et les analystes politiques doivent donc tenir compte des caractéristiques structurelles spécifiques de leur pays lors de la conception des politiques publiques. De nombreux pays d'Afrique au sud du Sahara sont des pays à faible revenu dont l'économie repose sur l'agriculture et se caractérise par de petits exploitants, des infrastructures insuffisantes et des niveaux élevés de pauvreté rurale et d'insécurité alimentaire. Diaz-Bonilla estime que les dépenses publiques en Afrique subsaharienne représentent en moyenne 20 % ou moins du PIB global et soutient que les politiques macroéconomiques de ces pays devraient se concentrer sur l'augmentation des dépenses publiques globales pour améliorer les infrastructures, les services de santé, l'éducation, la recherche et le développement agricoles et les filets de sécurité sociale. Par exemple, selon ses estimations, les dépenses de l'ASS en matière de R&D agricole s'élèvent à environ 539 millions de dollars US ; en revanche, ce chiffre est de 1 693 millions de dollars US dans la région Asie de l'Est et Pacifique.

Un domaine dans lequel les dépenses publiques augmentent rapidement en Afrique subsaharienne est celui des subventions aux intrants, en particulier pour les engrais. En 2011, 10 pays d'ASS représentant 60 % de la population de la région ont dépensé près d'un milliard de dollars US en subventions aux intrants, soit un total de 29 % de leurs dépenses publiques globales. En décomposant ces dépenses, il apparaît clairement que ces programmes de subvention des intrants peuvent avoir un impact fiscal important sur les pays dans lesquels ils sont mis en œuvre ; Diaz-Bonilla constate que le programme de subvention des intrants du Malawi représentait 2,8 % du PIB total du pays en 2010.

Déterminer les politiques macroéconomiques appropriées pour assurer le développement agricole et la sécurité alimentaire nécessite également une compréhension plus large de l'interaction entre les politiques économiques et le développement au niveau national et mondial. Par exemple, M. Diaz-Bonilla souligne que l'effet de la croissance économique des pays développés sur la croissance des pays en développement varie selon les régions ; pour l'ASS, la croissance dans l'Union européenne est particulièrement importante, 1 % de croissance économique dans l'UE entraînant 0,25 % de croissance en ASS. En revanche, la croissance aux États-Unis a un impact plus important sur la croissance en Amérique latine et dans les Caraïbes.

De même, les flux commerciaux et le type de biens échangés diffèrent également d'un pays à l'autre. En ce qui concerne l'Afrique subsaharienne, les exportations agricoles ont encore tendance à reposer largement sur le café, le thé et le cacao, ainsi que sur les fibres textiles ; les autres produits primaires exportés sont le pétrole, le bois, les métaux et les diamants. Les exportations de la région sont principalement destinées à l'Europe et à d'autres pays africains. Par conséquent, toute modification de la politique commerciale de l'Union européenne pourrait avoir un impact significatif sur l'Afrique en raison des liens commerciaux et financiers plus importants de cette région.

Le cadre présenté dans ce nouvel ouvrage peut constituer une première étape pour les décideurs politiques afin d'acquérir cette compréhension élargie de la manière dont les politiques régionales et mondiales interagissent, ainsi que de la manière dont les politiques macroéconomiques affectent et sont affectées par d'autres stratégies de développement, telles que les filets de sécurité sociale et les interventions sur les chaînes de valeur.

Le 28 octobre, un séminaire de politique s'est tenu à l'IFPRI pour lancer le livre intitulé Macroéconomie, agriculture et sécurité alimentaire : Guide pour l'analyse des politiques dans les pays en développement et pour offrir des discussions dirigées par des experts sur les questions importantes de la politique macroéconomique et de l'agriculture. Voir l'intégralité du seminaire